Epilogue

Épilogue

« La vie va de l’innocence à l’expérience par la perte d’illusions. »

Nous sommes maintenant en 2017, Fernando approche des 40 ans, la crise est derrière lui. Il est désormais éducateur dans une structure sociale. Au départ il y était entré pour faire de l’aide aux devoirs, mais il a tapé dans l’œil de son directeur qui a décidé de le garder et de lui payer une formation. Il s’occupe de jeunes en difficulté et ça lui plaît. Cette fois il pense avoir trouvé sa voie.

L’histoire de sa dépression débutée il y a huit ans n’est encore pas totalement achevée, il lui reste quelques pages à écrire. De ses deux années au fond il garde certaines séquelles, la reconstruction se poursuit. Parfois des accès de déprime, il lui arrive de broyer du noir, mais ça ne l’habite plus en permanence, il s’aime mieux. Quand des chemins de pensées accidentés se présentent à lui, il sait les contourner ; changer d'itinéraire pour ne pas se retrouver pris au piège de la spirale des idées noires, de la dévalorisation. Ses mécanismes de défense, il les a éprouvés, son fonctionnement il le connaît. Il est aussi plus prudent qu’avant. Depuis sa séparation il n’est pas parvenu à recréer une relation durable. Il se pose plus de questions, a du mal à se laisser aller, à faire confiance. De peur qu’on le vole à nouveau, à lui-même, à cet apaisement qu’il a eu tant de mal à trouver.

Avant il avait besoin de s’attacher, aujourd’hui il se méfie. « C’est une levée de boucliers », qui peut-être l’a empêché de s’investir pleinement dans un nouveau couple. Quelques années auparavant, il avait fait une tentative mais ça n’avait pas fonctionné. Encore prisonnier de ses souvenirs, il n'avait su empêcher la fin.

Mais à présent son deuil est fait, enfin presque, il ne lui met plus « de bâtons dans les roues », alors l’idée de s'engager à nouveau auprès de quelqu'un pourquoi pas, peut-être un jour.

L’horizon s’est éclairci, au fond de lui ce n'est plus une lueur mais un phare, il chasse la brume. Sa conception de la relation amoureuse a évolué. Il se veut plus tolérant, moins naïf, plus ouvert, assure qu’il ne foncera plus dans le « mur de la passion ». En clair ne pas être déçu si ce qu’il avait projeté sur autrui se révèle différent de ce qu’il est en réalité. Admettre qu’il y aura toujours une part de l’autre que l'on doit accepter comme telle, qu’on ne peut maîtriser, même si parfois cela vient briser nos illusions, nos ambitions. De son expérience de la dépression, il l’a compris.

La maladie a laissé des traces. Au-delà de la maturité il y a bien un avant et un après dans sa vie. Alors se comparer à l’homme qu’il était avant n'a pas vraiment de sens, puisque cette personne n’est plus la même. Son « noyau central » existe toujours, mais de nombreuses facettes ont changé. Il en a « amélioré » certaines et « abandonné » d’autres, comme des cellules mortes de peau, dans une sorte de mue psychique. Il pense à William Blake qui disait que « la vie va de l’innocence à l’expérience par la perte d’illusions ».

Sa relation aux autres s’est aussi transformée, il est plus attentif, moins volubile, prend le temps d’écouter, de comprendre. Le rapport n’est plus le même, l’échange a pris une nouvelle dimension. La poésie qu’il gardait pour lui, au fond d’un tiroir, il y a quelques années, il la partage avec ses proches désormais. Certains le poussent d'ailleurs à être publié, mais il hésite encore, ce n’est pas son ambition, ce qui l’intéresse lui c’est la création. Pourtant il y réfléchit, après tout le travail « prend aussi vie dans le regard de l'autre ». S'il ne le montre pas, alors « il n'existe qu'à moitié ».

Mais ce sera là une autre histoire ; une pour laquelle il reprendra son vrai prénom. En attendant celle-ci touche à sa fin, on verra bien la suite, il décidera, qui sait ?

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À propos...

Résilience

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